L'apprentissage de la propreté peut devenir un véritable parcours du combattant lorsqu'une expérience douloureuse vient bloquer l'enfant. Une maman témoigne de sa difficulté face à sa fille de 3 ans qui refuse catégoriquement d'aller aux toilettes depuis qu'elle a souffert d'une fissure anale.
Question de la maman :
Ma fille a 3 ans. Elle a été propre avant deux ans pour le pipi qu'elle contrôle parfaitement. Mais la première fois qu'elle a fait caca dans les toilettes, elle était un peu constipée, ce qui lui a provoqué une petite fissure dans l'anus.
Depuis lors, je n'ai jamais réussi à la convaincre d'aller aux toilettes pour faire caca et je dois lui mettre une couche pour qu'elle puisse faire, sinon elle se retient jusqu'à 5 ou 6 jours.
Comme elle va bientôt commencer l'école, cela fait une semaine que je ne lui mets pas de couche. Elle ne semble pas constipée, mais lorsqu'elle est assise sur les toilettes, sa réponse est que cela « ne sort pas ».
Que me conseillez-vous de faire ? Est-ce que je dois continuer à ne pas mettre la couche ou vaut-il mieux la mettre ? Je l'ai récompensée et punie de toutes les façons possibles (pas de bonbons, pas de télévision, avec ou sans jouet, etc.) Je ne sais plus comment agir. Merci.
Comprendre le lien entre fissure anale et blocage psychologique
La situation décrite par cette maman est plus courante qu'on ne le pense. Une fissure anale, même petite, peut créer un traumatisme psychologique durable chez l'enfant. Cette déchirure de la peau de l'anus provoque une douleur intense lors du passage des selles, comparable à une brûlure qui peut persister plusieurs heures après la défécation.
L'enfant associe alors inconsciemment les toilettes à la douleur, ce qui déclenche un mécanisme de défense : la rétention des selles. Ce comportement, bien que compréhensible, peut malheureusement aggraver le problème en créant un cercle vicieux. Plus l'enfant se retient, plus les selles deviennent dures, et plus le risque de douleur augmente lors de l'évacuation.
Ce phénomène est particulièrement fréquent lors de l'apprentissage de la propreté, une période où l'enfant développe justement sa capacité à contrôler ses sphincters et à gérer ses besoins de manière autonome.
Réponse du Pédiatre :
Punir pour ne pas accomplir un acte physiologique me semble très exagéré et risqué : votre fille va développer un sentiment de culpabilité ou elle va le prendre comme une façon de « tenir » ses parents.
Le contrôle des sphincters a lieu entre deux et quatre ans. Le fait d'avoir eu une fissure anale peut avoir une influence, bien sûr, mais n'y attachez pas trop d'importance, car la mémoire des enfants (pour beaucoup de choses) est très courte.
Si, en disant « toilettes », vous faites référence aux WC, alors essayez de l'asseoir pendant quelques minutes sur un pot un peu rigolo, qui attire son attention par son look et sa couleur.
Récompensez sa réussite, mais ne punissez pas l'échec. Et si un caca lui échappe, ne la changez pas immédiatement ; si votre petite fille se fâche, trouvez une excuse raisonnable pour ne pas le faire tout de suite : « Maintenant non. Dès que j'aurai un moment je te changerai » comme la chose la plus naturelle du monde. Il se peut que le fait de se sentir mal à l'aise incite l'enfant à faire dans le pot.

Les solutions concrètes pour sortir de l'impasse
Face à cette situation délicate, plusieurs stratégies peuvent être mises en place pour aider votre enfant à retrouver confiance :
Accepter temporairement la « propreté à la couche »
Contrairement à ce qu'on pourrait penser, autoriser votre fille à demander une couche pour faire ses selles n'est pas un recul. C'est même une solution recommandée par de nombreux spécialistes. L'enfant apprend ainsi à reconnaître ses besoins et à les exprimer, ce qui constitue déjà une étape importante de l'apprentissage de la propreté. Cette phase transitoire évite surtout la constipation liée à la rétention, qui pourrait aggraver la situation.
Créer un environnement rassurant
Le choix du matériel a son importance. Un petit pot coloré, à l'effigie de ses personnages préférés, peut transformer l'expérience. Certains enfants se sentent plus en sécurité sur un petit pot posé au sol que sur des toilettes d'adulte avec un réducteur. La stabilité et le confort sont essentiels pour que l'enfant puisse se détendre.
Agir sur le transit intestinal
Pour éviter toute douleur future, il est primordial de maintenir des selles molles. Une alimentation riche en fibres (fruits, légumes, céréales complètes), une bonne hydratation et, si nécessaire, un traitement laxatif doux prescrit par le pédiatre permettront d'éviter la constipation. Des selles souples ne provoquent aucune douleur et aideront progressivement votre fille à oublier le traumatisme initial.
Abandonner le système de punitions
Comme le souligne le pédiatre, les punitions sont contre-productives dans ce contexte. Elles ne font qu'ajouter une pression psychologique à une situation déjà difficile pour l'enfant. La patience et l'encouragement sont les meilleures armes des parents. Félicitez les petites victoires sans dramatiser les échecs.
L'entrée à l'école : gérer la pression sans stress
La rentrée scolaire approche et c'est souvent une source d'anxiété supplémentaire pour les parents. Il est important de savoir que l'école maternelle accueille les enfants même s'ils ne sont pas totalement propres. Les professionnels de la petite enfance sont habitués à accompagner les enfants dans cet apprentissage.
N'hésitez pas à discuter ouvertement avec l'équipe éducative de la situation de votre fille. Un dialogue transparent permettra de mettre en place une continuité entre la maison et l'école. Certains enfants, d'ailleurs, franchissent le cap de la propreté complète une fois scolarisés, par mimétisme avec leurs camarades.
En attendant, vous pouvez préparer un petit sac avec des vêtements de rechange et des couches-culottes, que votre fille pourra utiliser si besoin. Cette solution pragmatique évitera le stress et la rétention pendant les heures de classe.
Vos questions fréquentes concernant la propreté et les fissures anales
1. Combien de temps peut durer ce blocage psychologique lié à une fissure anale ?
La durée varie selon chaque enfant, mais avec une approche patiente et sans pression, la plupart des enfants surmontent ce blocage en quelques semaines à quelques mois. L'important est de ne pas forcer et de laisser l'enfant reprendre confiance à son rythme. Dans certains cas, le blocage peut persister jusqu'à 4 ou 5 ans, mais il finit toujours par se résoudre.
2. Mon enfant se retient depuis plusieurs jours, dois-je consulter en urgence ?
Si votre enfant ne va pas à la selle depuis 5 à 6 jours et présente des signes d'inconfort (douleurs abdominales, ballonnements, perte d'appétit), il est recommandé de consulter rapidement votre pédiatre. Une rétention prolongée peut entraîner une constipation sévère nécessitant parfois un traitement spécifique.
3. Les récompenses sont-elles efficaces dans l'apprentissage de la propreté ?
Les récompenses positives (félicitations, petits autocollants, tableau des réussites) peuvent encourager l'enfant, à condition de rester mesurées et de ne jamais être suivies de punitions en cas d'échec. L'objectif est de valoriser les progrès sans créer de pression excessive.
4. Faut-il consulter un spécialiste si la situation persiste ?
Si malgré vos efforts et une approche détendue, la situation ne s'améliore pas après plusieurs mois, ou si votre enfant développe des troubles du comportement liés à cette problématique, n'hésitez pas à consulter un pédopsychiatre ou un psychologue spécialisé dans la petite enfance. Un accompagnement thérapeutique peut parfois débloquer la situation.
5. Peut-on prévenir les fissures anales chez les jeunes enfants ?
La prévention passe essentiellement par une alimentation équilibrée riche en fibres, une bonne hydratation quotidienne et une attention particulière au transit de l'enfant. Dès les premiers signes de constipation, il est préférable d'agir rapidement pour éviter que les selles ne durcissent. Le suivi régulier du développement de votre enfant permet de détecter précocement ces difficultés.
Conclusion : la patience comme meilleure alliée
L'apprentissage de la propreté est un processus qui se déroule différemment pour chaque enfant. Lorsqu'un événement douloureux comme une fissure anale vient perturber cet apprentissage, la clé du succès réside dans la patience et l'écoute.
Votre fille finira par être propre, à son rythme. En attendant, évitez toute forme de pression ou de punition qui ne ferait qu'aggraver son blocage psychologique. Privilégiez une approche douce, encourageante, et n'hésitez pas à accepter temporairement des solutions intermédiaires comme la couche sur demande.


