Vers l’âge de deux ans, les caprices font leur apparition. Ces épisodes, bien que faisant partie du développement normal de l’enfant, peuvent souvent laisser les adultes désemparés. La psychologue Mariana Capurro nous aide à mieux comprendre les caprices et partage des clés pour accompagner l’enfant de manière efficace et bienveillante.
Les caprices : une étape normale du développement
Entre deux et quatre ans (selon les caractéristiques individuelles de chaque enfant), les familles observent souvent un grand changement chez leurs jeunes enfants. Ces derniers deviennent plus insistants, voire plus protestataires, pour tout ce qu’ils désirent sans pouvoir l’obtenir. C’est à ce moment que beaucoup parlent de la fameuse phase des “terribles deux ans” (Les Terrible Two pour nos amis anglophones).
Un caprice est une réaction émotionnelle explosive, caractérisée par des pleurs, des cris, des mouvements incontrôlables, et parfois même une retenue de la respiration. Ces épisodes, généralement brefs (moins de 15 minutes), se produisent de manière occasionnelle.
Le véritable défi pour nous, adultes, est d’apprendre à accompagner l’enfant durant ces moments. Pour cela, il est important de comprendre ce qui a provoqué le caprice et ce qui se passe dans le cerveau de l’enfant à cette étape de son développement.
Quelles sont les causes des caprices ?
Dès l’âge de deux ans, le cerveau des enfants leur permet de visualiser ce qu’ils veulent ou souhaitent faire. Ils peuvent mentalement élaborer leurs désirs. Cela explique pourquoi ils sont si insistants et persistants à les exprimer.
Lorsqu’une réponse de l’adulte ne correspond pas à leurs attentes et ne leur permet pas de réaliser cette visualisation, ils ressentent de la frustration. Et c’est à ce moment qu’un caprice peut survenir.
• Gestion des émotions : Les enfants n’ont pas encore la capacité de gérer des émotions aussi intenses. Leur cerveau ne sait pas inhiber ou freiner cette “explosion émotionnelle”. Libérer cette énergie est essentiel pour eux.
• Besoins non satisfaits : Les caprices surviennent souvent lorsque certains besoins fondamentaux ne sont pas comblés (faim, soif, fatigue, inconfort thermique). Parfois, ils ne savent pas identifier ce qu’ils ressentent, ce qui les rend plus irritables.
• Changements dans la routine : Les enfants trouvent de la sécurité dans leurs habitudes. Un changement de routine peut provoquer une instabilité émotionnelle et, par conséquent, davantage de caprices.
• Ambiance familiale : Un environnement familial tendu (périodes de stress ou de conflits) peut influencer négativement le comportement de l’enfant, entraînant des réactions émotionnelles plus fréquentes.
• Compréhension erronée : À cet âge, les enfants interprètent souvent des situations de manière incorrecte. Par exemple, en passant devant un parc, ils peuvent supposer qu’ils vont y jouer, et si cela ne se réalise pas, leur déception peut se transformer en caprice.
• Recherche d’autonomie : Entre deux et quatre ans, les enfants développent une plus grande indépendance. Ils aiment explorer le monde et prendre des décisions, mais lorsqu’un adulte contredit ces décisions, cela peut être difficile à comprendre pour eux.
• Limites linguistiques : Leur capacité à s’exprimer oralement est encore limitée, ce qui peut engendrer frustration et colère lorsqu’ils ne parviennent pas à se faire comprendre.
Que faire pour éviter les caprices ?
Il ne s’agit pas de céder à tout pour éviter les larmes, mais plutôt de détecter et répondre aux besoins de l’enfant de manière respectueuse et efficace.
1. Anticiper les situations : En connaissant votre enfant, vous pouvez souvent prévenir certains caprices inutiles. Il ne s’agit pas de créer un environnement parfait, mais d’éviter des situations prévisibles qui pourraient déclencher des réactions excessives.
2. Expliquer à l’avance : Préparer l’enfant en lui expliquant ce qui va se passer peut réduire sa frustration. Par exemple : “Nous passons devant le parc, mais nous n’irons pas jouer aujourd’hui.”
3. Maintenir des routines : Les habitudes procurent un sentiment de sécurité à l’enfant. Savoir ce qui va se passer après chaque activité lui donne de l’autonomie et réduit son stress.
4. Faire preuve de flexibilité : Bien que les limites soient importantes, une certaine souplesse dans des situations non cruciales peut aider à éviter des conflits inutiles.
5. Proposer des choix : Donner à l’enfant un certain contrôle peut l’aider à mieux gérer ses émotions. Par exemple : “Nous ne pouvons pas prendre la balle bleue, mais tu peux choisir entre la verte et la rouge. Laquelle préfères-tu ?”
Comprendre ce qui motive les caprices permet d’accompagner votre enfant avec empathie et patience. Ces moments sont une étape normale de son développement, où il apprend à gérer ses émotions et à interagir avec le monde qui l’entoure.
Comment calmer une crise de colère ?
• Identifier la cause de la crise : Il est essentiel de comprendre ce qui a déclenché la crise. Souvent, même l’enfant ne sait pas exactement ce qui lui arrive. Il ressent simplement une frustration liée à un besoin ou un désir non satisfait. Si vous parvenez à identifier la cause, vous pourrez lui apporter une aide adaptée pour résoudre la situation.
• Gérer vos propres émotions : Votre calme est crucial. Les enfants n’ont pas encore la capacité de réguler leurs émotions comme les adultes, et ils ont besoin de vous pour les guider. Si vous réagissez avec sérénité, la crise aura probablement une durée plus courte. En plus, vous lui montrez par l’exemple comment réagir face à des situations similaires à l’avenir.
• Ne pas entamer de dialogue prolongé pendant la crise : Lorsque l’enfant est en plein cri ou en pleurs, tenter de le raisonner ou de lui donner une leçon risque de le perturber davantage. Limitez-vous à des messages simples et courts. Une fois qu’il sera calmé, vous pourrez discuter plus en détail de ce qui s’est passé.
• Valider ses émotions : Montrez à votre enfant que vous comprenez ce qu’il ressent et que vous ne le jugez pas. Cela le rassurera et l’aidera à mettre des mots sur ses émotions. Par exemple : “Je vois que tu es très en colère parce que nous ne sommes pas allés au parc” ou “Je comprends que tu sois triste de ne pas avoir pu acheter toutes les friandises que tu voulais.” En faisant cela, vous lui enseignez aussi à reconnaître et exprimer ses émotions.
• Proposer des solutions une fois le calme revenu : Attendez que l’intensité de ses émotions diminue avant de lui offrir des alternatives ou des solutions. Cela l’aidera à se sentir valorisé et à participer activement à la résolution du problème. Par exemple, lui laisser choisir parmi des options adaptées lui donnera un sentiment de contrôle.
À éviter absolument pour calmer les caprices et crises de colère
Ne recourez pas au chantage ou aux menaces. Inutile aussi de chercher à le culpabiliser. Votre enfant ressent déjà un mal-être durant la crise. L’objectif est de l’apaiser et de lui montrer qu’il peut compter sur votre soutien bienveillant. Parlez-lui de manière respectueuse et calme, afin qu’il comprenne que vous êtes là pour l’aider.
Que faire si mon enfant me frappe ou se frappe lui-même ?
• S’il frappe les autres : Si votre enfant se met à frapper, il est important de le contenir sans violence. Par exemple, attrapez doucement ses mains pour l’empêcher de continuer, en expliquant clairement votre geste :
• “Je vais tenir tes mains parce que tu es en train de me frapper, et cela me fait mal. Quand tu seras plus calme, nous trouverons une solution.”
Si la situation l’exige, éloignez-vous pour mettre de la distance :
• “Je vais m’éloigner pour que tu arrêtes de me frapper. Quand tu seras calme, nous discuterons de ce que tu veux.”
Parlez toujours avec un ton bas, posé et ferme, pour lui montrer que vous gardez le contrôle.
• S’il se frappe lui-même : Si votre enfant se blesse lui-même de manière occasionnelle, votre rôle est de le protéger. Éloignez tout objet pouvant représenter un danger immédiat, et, si nécessaire, maintenez-le doucement pour prévenir les blessures, tout en lui parlant calmement pour l’apaiser. Une fois qu’il est plus détendu, vous pourrez reprendre le dialogue.
Accompagner un enfant durant ces moments de forte émotion demande patience, compréhension et respect. Votre attitude sereine et empathique est essentielle pour l’aider à apprendre à gérer ses propres émotions et à construire une relation basée sur la confiance et la sécurité.
Quand faut-il s’inquiéter d’une crise de colère ?
Les crises de colère surviennent généralement entre l’âge de deux et quatre ans, bien que cela puisse varier en fonction de chaque enfant, notamment en termes d’intensité et de durée.
Il est important de rester attentif aux caractéristiques générales de ces crises. Vous devriez envisager de consulter un spécialiste si :
• Les crises surviennent trop fréquemment (plus de deux ou trois fois par jour) ;
• Elles sont très intenses ;
• L’enfant se fait du mal ou met en danger son intégrité ou celle des autres ;
• Elles sont accompagnées d’incontinence urinaire.
De même, si ces épisodes persistent de manière régulière après l’âge de quatre ans, il serait judicieux de demander l’avis d’un professionnel. À cet âge, les enfants commencent à mieux maîtriser leurs émotions, et les crises de colère devraient donc diminuer progressivement.