Vous vous demandez comment gérer la jalousie entre vos enfants ? Découvrez dans cet article comment comprendre ce sentiment naturel et aider vos enfants à construire une relation fraternelle harmonieuse.
"La jalousie est bonne et saine, car elle naît de l'amour. Si les enfants étaient incapables d'aimer, ils ne seraient jamais jaloux", affirme le grand psychologue et psychanalyste anglais Donald Winnicott. Elles représentent donc un sentiment positif, preuve que l'enfant ne veut pas être privé de l'amour parental.
Il faut donc accepter la jalousie comme une manifestation tout à fait naturelle.
Tous les enfants veulent être aimés exclusivement. Les parents leur offrent non seulement de la nourriture et de la protection, mais aussi le sentiment de leur propre identité, de leur propre valeur et de leur caractère unique.
C'est pourquoi l'intrusion d'un frère ou d'une sœur menace cette exclusivité. L'enfant l'interprète comme moins de temps à passer avec ses parents, moins d'attention, moins de câlins et peut-être moins de cadeaux. En outre, ce qui l'inquiète le plus, et qui n'est guère exprimé explicitement, c'est la crainte que l'intrus lui "prenne" en quelque sorte sa place.
Pour les adultes, il ne s'agit que d'imagination, mais pour les enfants, ce sont de véritables peurs. C'est pourquoi, à la naissance d'un petit frère ou d'une petite sœur, ils se battent avec ténacité pour conquérir tous les espaces, avoir tous les jouets, toute la nourriture, tout l'amour et tout l'espace de la maison.
Jalousie refoulée : pourquoi il ne faut pas l'ignorer
Comme l'amour, la jalousie n'est pas un trait de personnalité, mais un sentiment. Un enfant ne naît pas jaloux, il le devient. Et, comme l'amour, la jalousie grandit, s'enracine, se renforce, l'emporte sur toute capacité de raisonnement logique et étouffe tous les autres sentiments.
Et, malgré tout, il ne faut pas la refouler. Ressentir de la jalousie à l'égard de son petit frère (ou sa petite soeur), être capable de l'exprimer puis de la surmonter, est une étape obligatoire de la croissance ; elle révèle la capacité d'aimer de l'enfant, elle enrichit et féconde son monde intérieur. Donald Winnicott poursuit en expliquant : "Les personnes très jalouses, lorsqu'elles étaient petites, ont eu la malchance de ne pas pouvoir exprimer leur jalousie et leur agressivité. Si elles avaient eu cette possibilité, elles auraient pu surmonter leur jalousie et s'en débarrasser, comme le font la plupart des enfants. Au contraire, ce sentiment demeure dans les structures de leur personnalité, même si la raison qui l'a déclenché est perdue depuis longtemps. À l'âge adulte, ces personnes trouvent sans cesse des excuses pour être jalouses et sont convaincus qu'elles font le bon choix."
En exprimant sa jalousie, l'enfant trouve un moyen de la réorienter et d'utiliser son énergie à des fins positives : compétitivité et ambition modérée de réussite. Si, en revanche, l'expression de ce sentiment est étouffée, parce qu'elle est interdite et non reconnue comme une manifestation compréhensible du désir de l'enfant de s'assurer l'amour parental, elle reste en lui et continuera à conditionner sa vie, même à l'âge adulte.
Préparer l'arrivée d'un petit frère ou d'une petite sœur
La façon dont l'enfant vit la nouvelle présence dans la famille dépend dans une large mesure de votre comportement. Tout déplacement ou modification doit être communiqué comme une nouveauté positive, et non comme un renoncement ou une résignation pour faire de la place à quelqu'un d'autre. Il est donc important de faire un effort conscient pour s'assurer que l'enfant plus âgé ne voit pas le petit frère ou la petite sœur comme quelqu'un qui le prive de privilèges, qui le remplace dans les attentions de son père et de sa mère, et qui n'a pas le droit de s'approcher de lui.
Pour apaiser la souffrance de l'enfant, deux stratégies peuvent être adoptées : diluer dans le temps les changements inévitables dus à la nouvelle présence à la maison, ou les présenter de manière positive, afin qu'ils soient vécus par l'enfant comme des conquêtes, et non comme des défaites.
Voyons comment.
À chacun sa place
Si, pour faire de la place au petit frère, vous devez réduire l'espace dont l'aîné a toujours bénéficié, le changement doit être effectué bien avant la naissance. Quelques mois avant l'événement, vous pouvez décider de réorganiser les espaces de la maison. Si possible, ne vous limitez pas à modifier l'aménagement de la chambre de l'enfant, mais intervenez d'une manière ou d'une autre dans le reste des pièces. Il peut suffire de peindre un mur, d'accrocher un tableau ou de réorganiser le mobilier. De cette manière, l'enfant sera plus enclin à accepter des changements dans sa chambre.
Les deux dans la même pièce
Si les enfants ont le même âge, même si vous avez deux pièces, la solution proposée par de nombreux experts est de les faire dormir dans la même pièce et d'utiliser l'autre pièce comme salle de jeux. En dormant ensemble, ils apprendront vite à se tenir compagnie, surtout au moment critique de l'endormissement. En partageant l'espace, il est plus facile pour eux de développer un sentiment profond de proximité et d'intimité. En revanche, si le nouveau-né dort dans la chambre des parents, il est plus facile de déclencher la jalousie.
Conserver les routines familiales pour rassurer l'aîné
Dans la période qui précède la naissance d'un petit frère ou d'une petite sœur, il est essentiel de conserver tous les repères de l'aîné : le rituel du sommeil, les câlins dans le lit avec papa et maman, les promenades avec papa ou les grands-parents le dimanche matin... Dans la mesure du possible, les grands changements doivent être reportés à plus tard : un déménagement, l'entrée à l'école maternelle ou l'arrivée d'une nouvelle baby-sitter. Privé de ses habitudes, l'enfant se sentirait désorienté et plein d'incertitudes. Dans son esprit, tous ces bouleversements, qui se font souvent en toute bonne foi, "pour son bien", seraient immédiatement liés à l'arrivée du bébé, et pourraient être accentués, au point d'être interprétés comme une tentative de se débarrasser de l'enfant. En effet, dans les premières années de sa vie, l'enfant interprète tout ce qui se passe autour de lui comme se rapportant exclusivement à lui.
Un cadeau pour tous : célébrer ensemble l'arrivée du bébé
Associer l'arrivée d'un frère ou d'une sœur à un cadeau important ne peut que créer des associations positives. Le message à faire passer, et qui correspond à la réalité, est que l'arrivée d'un autre enfant représente un enrichissement pour l'enfant, et qu'il faut donc le fêter : l'aîné aura quelqu'un avec qui jouer et il y aura plus de joie à table, car les deux frères et sœurs auront toujours quelqu'un à qui parler. Chaque année, il y aura un nouvel anniversaire, et donc un nouveau gâteau avec des bougies ; quand ils seront grands, les deux seront amis... Si l'un des parents a été enfant unique, il pourra raconter comment il a vécu sa solitude et l'envie qu'il ressentait pour les enfants qui avaient des frères et des sœurs.
Quand commence la jalousie ? Les premiers signes à repérer
La jalousie commence lorsque l'enfant commence à soupçonner que quelqu'un veut le priver de la possession privilégiée et exclusive de sa mère. Les psychologues situent la date de cette découverte vers 15 mois, âge auquel l'enfant réalise qu'il n'est plus le centre de l'univers. Cette prise de conscience s'accentue et se renforce entre deux et trois ans : bien qu'il ait conquis plus d'autonomie, l'enfant a toujours besoin de se sentir petit et protégé. Ses sentiments sont intenses et directs, car il n'a pas encore acquis la capacité de les contrôler.
Le moment où le nouveau-né est allaité est celui qui suscite le plus d'envie et fait remonter à la surface le désir d'être à nouveau petit, de pouvoir jouir de ce privilège. Cette réaction est tout à fait normale et ne doit pas inquiéter.
Comment l'arrivée du bébé change la dynamique familiale
Avant l'arrivée du bébé, les relations affectives de la famille tournaient autour de trois pôles : le père, la mère et l'enfant. Avec l'arrivée d'un nouvel enfant, la dynamique familiale s'enrichit et se complique. Pour la première fois, l'enfant unique doit faire face à un concurrent : il est contraint de partager, de coopérer, de négocier, de se disputer, de se battre et d'apprendre à perdre.
Face à ce réseau de relations soudainement compliqué, la première réaction de l'enfant est la jalousie, qui représente une tentative d'éliminer l'intrus et de rétablir les relations familiales qui existaient avant son arrivée. Avec beaucoup de douleur et de déception, l'aîné est contraint d'accepter que cela n'est pas possible.
Comme si cela ne suffisait pas, dans de nombreux cas, au cours de ce processus de prise de conscience, il ne se sent même pas compris. On se moque de lui, voire on le punit, comme si vouloir retrouver ce qu'il a perdu était une mauvaise chose.
Or, le premier-né est "l'aîné". Maîtrise de soi, responsabilité, générosité et même acceptation sont attendues du personnage désagréable qui a osé accaparer la mère et toutes ses attentions pendant une bonne partie de la journée.
Transformer la jalousie en opportunité de grandir
Malgré les difficultés, l'arrivée d'un petit frère ou d'une petite sœur est un moment essentiel dans la maturation psychologique de l'enfant, qui jouissait jusqu'alors du rôle privilégié mais solitaire d'enfant unique.
Les conséquences psychologiques et affectives positives de l'introduction d'un nouvel enfant dans la famille sont les suivantes :
- L'enfant rompt la relation symbiotique avec sa mère : "symbiose" signifie "vivre ensemble", donc "vivre dans une relation très étroite". En effet, pendant les premières années de sa vie, l'enfant unique a une relation exclusive avec sa mère, qui est entièrement à sa disposition. Il n'a à faire face à personne pour sa possession. La mère ne lui est jamais refusée et il se sent maître du monde, un petit tyran à qui tout est permis. Le charme est rompu avec la naissance du petit frère. Il doit maintenant apprendre à avoir son propre espace, à partager l'amour de ses parents avec l'autre. Mais il doit aussi apprendre à construire une relation profonde avec son frère ou sa soeur. Il lui faut alors faire un saut et passer de relations individuelles avec les parents à des relations sociales avec une famille.
- L'enfant est contraint de sortir de son égocentrisme : la souffrance causée par la nécessité de partager sa mère avec un adversaire le pousse à trouver de nouvelles stratégies pour se faire approuver. Il doit cesser de se considérer comme "le centre du monde". Il s'intéresse à sa petite soeur au moins pour s'assurer l'approbation de ses parents ; il apprend à mettre de côté la satisfaction immédiate de ses désirs et adopte un comportement responsable et coopératif.
- L’enfant se rend compte que ses parents continuent à l'aimer : il découvre que, malgré ses peurs irrationnelles, la concurrence que représente le nouveau venu, ses manifestations de jalousie et le mal qu'il fait au bébé, l'amour de ses parents n'a pas changé. C'est un amour inconditionnel.
Construire l'amour fraternel : du conflit à la complicité
Il ne faut pas craindre que la jalousie empêche le développement d'un lien profond entre frères et sœurs. Bien au contraire. L'enfant est intensément jaloux parce qu'il l'aime intensément. Dans une fratries, les enfants se disputent, se frappent, se pincent, se font des reproches, mais parfois ils se prennent dans les bras et se cherchent. Ce qui distingue leur relation de toutes les autres, c'est qu'ils peuvent exprimer leur agressivité sans mettre en péril leur lien profond.
Dans la plupart des cas, l'antagonisme initial fait progressivement place à une relation d'amitié et de tendresse fraternelle.
Cela dépend en grande partie des adultes : moins ils interviennent dans les relations entre frères et sœurs, plus ils éveillent facilement chez eux une solidarité profonde et durable.
Encourager l'expression par le jeu et les histoires
Si vous avez l'habitude de raconter des histoires à votre enfant, choisissez celles qui racontent des histoires de jalousie entre frères et sœurs, d'enfants abandonnés ou imposés par de méchantes belles-mères, comme l'histoire du Petit Poucet ou de Cendrillon, ou encore celle des Trois Petits Cochons, dans laquelle seul l'aîné parvient à résister au loup.
En revivant ses peurs, protégé par vos bras et projeté dans un monde fantastique, l'enfant pourra s'apaiser. Les poupées, les marionnettes et les peluches offrent également à l'enfant la possibilité de projeter sur elles ses frustrations, d'évacuer son agressivité ou d'exprimer son affection. De même que ses sentiments à l'égard du nouveau venu vont de l'amour inconditionnel au rejet absolu, il passe également d'un extrême à l'autre avec les poupées et les peluches : il les nourrit, les lave, les caresse, les prend dans ses bras, les gronde, les frappe et leur en fait voir de toutes les couleurs. Avec ses peluches, l'enfant invente des histoires, exprime des sentiments et des ressentiments qu'il n'ose pas exprimer directement.
Enfin, les masques et les déguisements lui permettent de jouer des rôles opposés : le prince ou l'ogre, la fée ou la sorcière, les deux extrêmes entre lesquels oscillent ses sentiments.
Les erreurs à éviter pour ne pas aggraver la jalousie
Lorsque vous ramenez le petit frère ou la petite sœur à la maison, il est important d'éviter certains comportements qui peuvent déclencher la jalousie du grand frère ou de la grande sœur.
- Consacrer toute l'attention au nouveau-né : par exemple, lorsque la famille et les amis arrivent, il arrive que l'aîné soit complètement ignoré. Lorsque vous invitez la famille, demandez-leur de consacrer également leur attention à l'aîné, sans faire de comparaisons ou de commentaires. S'ils veulent apporter un cadeau pour le plus jeune, il est important de ne pas oublier l'aîné.
- N'oubliez pas l'aîné : pour lui aussi, c'est une fête, car il est devenu le "grand frère".
- Préparez la chambre du nouveau-né au bon moment : si vous voulez que le bébé dorme avec vous, attendez pour préparer sa chambre ou l'espace dans la chambre de l'aîné. Ce dernier ne comprendrait pas pourquoi le petit doit avoir deux espaces.
- Gâter le petit pendant que l'aîné fait une crise de jalousie : il donne des coups de pied dans le lit, crie, se jette par terre, mais ne reçoit aucune attention. Pour "l'encourager" à aimer son petit frère, donnez l'exemple et, en tenant le nouveau-né dans vos bras, invitez-le à faire de même : "Regarde comme il est mignon, donne-lui un baiser, une caresse...". Mais ce n'est pas utile dans un moment de jalousie ; c'est l'aîné qui a besoin d'attention et de caresses.
- Lui demander de ne pas faire de bruit parce que le bébé dort : en général, les nouveau-nés dorment même s'il y a du bruit autour d'eux. Dans tous les cas, il est moins grave de faire perdre le sommeil au petit que de donner à l'aîné l'impression que sa vie dépend de l'emploi du temps et des besoins de son frère ou sa soeur.
- Imposer des interdictions permanentes : "Attention, ne lui fais pas mal", "Ne le serre pas si fort"... Direz-vous la même chose lorsque le petit commencera à l'embêter ? Si vous voulez corriger l'impétuosité de votre aîné, au lieu de le retenir, montrez-lui comment on fait.
- Sortir le soir avec le plus jeune et laisser l'aîné à la baby-sitter : vous renforceriez le sentiment d'abandon de l'aîné.
Que faire si l'aîné devient agressif envers le plus jeune ?
Face aux actes agressifs d'un enfant envers son frère ou sa sœur, le comportement des adultes oscille entre deux extrêmes. Souvent, on réagit par l'indulgence ("Tu ne l'as pas fait exprès ?"), l'indifférence ("Il ne s'est rien passé") ou la répression ("Tu es méchant !"). Cependant, d'après l'expérience d'innombrables parents, aucune de ces trois solutions ne résoudra le problème.
Pour savoir comment réagir, il est important de comprendre le point de vue de l'enfant : l'enfant déteste le bébé parce qu'il craint qu'on l'aime plus que lui. Si vous êtes en colère ou froid avec lui, ses craintes seront renforcées. Se sentant rejeté, il devient anxieux et le ressentiment à l'égard de son petit frère ou de sa petite sœur grandit dans son cœur.
Il existe une autre raison pour laquelle il est déconseillé de culpabiliser un enfant qui frappe son petit frère ou sa petite sœur. Effrayé par votre réaction, il apprend à ne pas exprimer sa jalousie et la garde en lui, ce qui a pour conséquence qu'elle dure plus longtemps, précisément parce qu'il n'a pas la possibilité de l'exprimer ouvertement.
Il n'y a pas de mal à montrer au petit agresseur que vous êtes irrité, mais avec une précaution très importante : vous devez lui faire comprendre que ce n'est pas lui le méchant, mais son comportement, et que celui-ci peut donc être modifié.
Ce point est particulièrement important, car un enfant, jusqu'à l'âge de l'adolescence, ne sait pas accepter une réprimande sans se mettre sur la défensive, voire devenir hostile. Comme il n'est pas encore capable de se dissocier de ses actes, il pense que faire ce qu'il ne faut pas, c'est être mauvais et incapable. De plus, la réprimande ne l'encourage pas à changer. Par conséquent, il est important d'éviter de le blâmer.
Certains éléments doivent être garantis :
- Protéger l'enfant pour qu'il ne soit pas en danger.
- Faire comprendre à l'aîné qu'il n'a pas le droit d'exprimer sa jalousie par un comportement agressif.
- Faire en sorte qu'il ait confiance en l'amour de ses parents, en le cajolant encore plus que d'habitude, afin qu'il comprenne que, malgré la tempête de haine qu'il ressent à l'intérieur de lui-même, il reste un enfant très aimé.
Saisissez l'occasion de lui faire comprendre que ses sentiments sont compréhensibles et acceptables. Ce qui n'est pas permis, c'est de les transformer en actes agressifs. Prenez votre enfant dans vos bras et dites-lui : "Je sais ce que tu ressens. Tu voudrais qu'il n'y ait personne d'autre et que papa et maman ne s'intéressent qu'à toi. Mais tu peux être sûr d'une chose : nous t'aimerons et t'aimerons toujours.
Si vous parvenez à lui faire comprendre que vous acceptez ses sentiments de colère et que vous l'aimez toujours, ce sera la meilleure preuve pour lui qu'il n'a aucune raison d'être jaloux.
Apaiser l'agressivité : des stratégies efficaces
Empêcher l'enfant de blesser son frère ou sa sœur n'est pas seulement une action défensive envers le plus petit. Les pulsions agressives, si elles ne sont pas contenues, peuvent également affecter l'enfant plus âgé, qui les perçoit en lui-même comme un torrent débordant sans digue de retenue. Il est donc nécessaire que quelqu'un y mette un terme et l'empêche de faire du mal à son petit frère. Si cela devait arriver, il serait le premier à en souffrir et pourrait être traumatisé par les conséquences de ses propres actes. Le laisser agir sans lui fixer de limites le maintient dans un état d'immaturité et de désorientation qui l'insécurise.
Face à un enfant qui a "perdu la tête", il est inutile de lui en demander la raison. Il ne saurait pas quoi répondre. C'est justement l'impulsivité de l'enfant qui le rend incapable d'analyser les raisons de ses propres actions. Au contraire, il est beaucoup plus utile de lui demander : "Décris-moi comment tu as fait, comment cela s'est passé". En retraçant l'enchaînement de ses actions et en les expliquant, l'enfant ne se sent pas jugé et apprend à prendre conscience de son impulsivité. C'est la première étape pour décider de la contrôler.
Accepter et comprendre le rejet de l'enfant
Souvent, l'aîné manifeste de l'hostilité à l'égard du cadet. "C'est ton frère et tu dois l'aimer", lui dit-on souvent avec les meilleures intentions du monde, mais ces exhortations ne font qu'accroître son ressentiment. Au contraire, essayez de lui témoigner de la sympathie et de la compréhension en lui expliquant que vous aussi, si vous n'étiez pas enfant unique, vous étiez jaloux de votre petit frère ou de votre petite sœur quand vous étiez enfant : il ou elle pleurait la nuit, il fallait toujours le changer ou lui donner à manger, il ou elle voulait toujours être le centre d'attention, etc. Mais ensuite, vous êtes devenus amis.
Il en sera de même avec son petit frère ou sa petite sœur. Restez près de lui, écoutez-le et faites-le toujours se sentir "plus grand" en lui disant que le bébé ne peut pas marcher, ne peut pas parler, ne peut pas manger seul et ne peut pas jouer au ballon avec papa et maman. Surtout, donnez-lui confiance : "Quand tu étais petit, je t'avais toujours dans mes bras toi aussi. Mais si tu veux que je te fasse des câlins comme quand tu étais petit, je suis là pour toi".
La jalousie cachée : déceler les signes subtils
L'agression directe est le mode d'expression le plus simple de la jalousie. Cependant, l'enfant n'est pas toujours capable d'exprimer de manière explicite les pensées qui le tourmentent. L'une des réactions les plus courantes à la naissance d'un frère ou d'une sœur est ce que les psychologues appellent la "régression". Si le bébé polarise l'attention des parents, "Pourquoi ne pas redevenir comme lui, pour qu'ils s'occupent de moi aussi ?"
Votre grand recommence à faire pipi dans sa culotte, il veut être nourri, vient dans votre bras dès qu'il en a l'occasion et veut dormir avec savous. Des phrases telles que : "Mais tu es un grand garçon", "Les grands garçons ne font pas ces choses-là" ou "Tu te comportes comme un petit garçon" sont contre-productives, car elles ne font qu'accroître son insécurité. En réaction, il poursuivra et accentuera encore son comportement de petit garçon. En revanche, vous pouvez "gronder" le bébé en lui disant d'un ton mi-sérieux : "Regarde ce que tu fais avec la bouillie", "Regarde, ta grande soeur va toutes seule sur le pot, on verra combien de temps il te faut à toi pour aller sur le pot !" L'enfant plus âgé s'amusera d'entendre sa mère "gronder" le petit, et il sera fier de ses exploits de "grand".
Dans tous les cas, laissez-le libre de se comporter comme son petit frère ou sa petite sœur : boire au biberon, être dans vos bras, etc. Cependant, faites-lui comprendre que l'autonomie est un grand privilège, qui lui permet d'être plus libre et de décider seul. Tôt ou tard, il se rendra compte qu'il n'est pas très agréable d'être petit et il reviendra à un comportement normal.
- L'enfant explose soudainement de colère : c'est l'une des manifestations les plus courantes et les plus directes de la jalousie. Il pique alors une crise, hurle, se jette à terre, donne des coups de pied ou mord. "La principale cause de toute forme de violence est la perception d'être indésirable", observe le psychologue français Haim Harboun. Le moyen le plus efficace de calmer la rage de l'enfant jaloux est d'être "son fan numéro un", c'est-à-dire de lui montrer que vous êtes de son côté, tout en l'empêchant de se faire du mal et d'en faire aux autres.
- Se cacher : un enfant qui se cache dans un placard ou ailleurs dans la maison envoie un message : "Maman me néglige et s'occupe davantage de mon petit frère ou de ma petite sœur". Le fait de se cacher est une demande d'aide, une invitation à venir le chercher. Et c'est précisément ce qu'il faut faire : montrer que l'on ne veut pas le perdre et lui témoigner tout son amour, sans le gronder parce qu'"il nous rend fou".
- Étouffer le petit avec de l'attention : parfois la jalousie de l'aîné se cache derrière un masque de préoccupation et d'attention excessives à l'égard de son rival. Il s'inquiète de la santé de son petit frère ; il a constamment peur qu'il se blesse ; s'il l'entend pleurer, il s'inquiète et, s'il le perd de vue un instant, il le cherche avec angoisse. Mais il ne faut pas se faire d'illusions...
Certes, il est bon que l'enfant manifeste son amour pour son frère ou sa sœur, mais cela ne signifie pas qu'il ne souffre pas de jalousie. Au contraire, l'excès de sollicitude à l'égard du frère ou de la sœur est une autre façon d'exprimer son stress.
Les façons dont l'enfant exprime son anxiété sont indirectes ou ne se manifestent que dans certaines circonstances. Par exemple, à la maison, il est très tendre, mais devient soudain grossier si quelqu'un complimente le bébé dans la rue.
La jalousie qui sommeille depuis des mois se manifeste souvent violemment lorsque le petit commence à se déplacer de manière autonome ou à faire ses premiers pas. La première fois que le petit rampe vers un des jouets de l'aîné et s'en empare, la rivalité refoulée explose comme une bombe à retardement. L'aîné se rend compte que son rival envahit son territoire et décide de le défendre bec et ongles.
Il est important d'aider l'enfant à exprimer sa jalousie sans qu'il ait peur de vous contrarier.
- Il insulte son petit frère ou sa petite soeur : l'enfant, jaloux de l'attention portée au nouveau venu, tente de se consoler en l'insultant et en le méprisant. Ce comportement apparemment anodin doit également être combattu avec une douce fermeté. Si vous laissez l'aîné maltraiter le petit, que vous prétendez tant aimer, il pense que vous risquez un jour de laisser n'importe qui le traiter de la même manière, et cette pensée ne lui donne pas confiance.
- Il provoque et fait des rebuffades aux parents : les rebuffades ont pour but d'attirer l'attention. Cependant, réagir avec force ou répondre à une provocation en se mettant en colère équivaut à communiquer à l'enfant que sa tactique est efficace. Peu importe que vous le punissiez, que vous l'enfermiez dans la pièce ou que vous criiez comme lui. Le but était de vous faire cesser de vous occuper de "l'autre", et il a réussi. Puisque la rebuffade "fonctionne", il la répétera de plus en plus souvent. Pour briser la spirale du chantage, essayez de calmer son irritation légitime en la considérant comme une demande d'appel à l'aide. Faites-lui comprendre que vous comprenez ses réactions de colère et expliquez-lui calmement que, malgré cela, vous ne l'autorisez pas à exprimer son ressentiment de cette manière. Enfin, essayez d'éviter la provocation et les reproches : s'il veut un peu plus de câlins, ne lésinez pas.
- Il fait preuve d'indifférence : ignorer la présence de l'intrus est un moyen de contrôler l'agressivité et la jalousie. L'enfant se comporte comme si le petit frère ou la petite sœur n'existait pas, en attendant que cela devienne une réalité. Il fait comme s'il n'y avait personne, mais, en réalité, cette présence étrange l'agace infiniment. Ce n'est pas une situation facile à supporter longtemps. Comme la vapeur d'une cocotte-minute, la jalousie s'accumule jusqu'à faire sauter le couvercle s'il n'y a pas d'échappatoire. De même, l'amertume de la jalousie remonte tôt ou tard à la surface et explose.
L'enfant sensible et renfermé a besoin d'être continuellement réconforté, même s'il ne semble pas en avoir besoin. Pour l'aider à extérioriser ses sentiments, essayez de les exprimer pour lui : "Je sais que tu n'aimes pas que je passe autant de temps avec ton petit frère. J'aimerais passer plus de temps avec toi aussi. Je te promets que nous serons ensemble le plus souvent possible". Pour tenir votre promesse, demandez de temps en temps à une amie ou à une baby-sitter de rester avec le bébé. Vous pourrez ainsi vous consacrer exclusivement à votre aîné.
Quand la jalousie ne se manifeste pas : faut-il s'inquiéter ?
Le déni de ses propres sentiments négatifs est souvent à l'origine d'un comportement particulièrement gentil et généreux à l'égard d'un frère ou d'une sœur. Pour savoir si ces sentiments sont authentiques, il existe quelques signes. Tout d'abord, les marques d'affection sont exagérées et trop nombreuses pour être crédibles. Il arrive qu'un baiser se transforme soudain en mordillement et une caresse en pincement. Ces comportements contradictoires sont la confirmation des sentiments ambivalents que le petit garçon éprouve à l'égard de son frère : il l'aime, mais il aimerait aussi qu'il ne soit jamais né.
Mais ce qu'il faut observer, c'est l'attitude générale de l'enfant : il semble stressé, très sensible et fatigué. L'effort nécessaire pour masquer ses sentiments est important. Montrez-lui qu'il peut avoir confiance en votre amour et que vous avez aussi besoin d'être avec lui. Trouvez également quelques moments pour être exclusivement avec lui.