J'ai été agréablement surprise de voir comment, dans une émission de télévision, une mère s'excusait auprès de sa fille de dix ans
d'avoir projeté sur elle ses propres rêves, la forçant à participer à des activités extrascolaires telles que la danse et le chant qui n'intéressaient pas l'enfant, mais qui représentaient ce que la mère avait toujours voulu faire et qu’elle n’avait pas réalisé, soit parce que cela n’était pas possible, soit parce qu’elle n’en avait pas eu le courage.
La maternité est un cadeau de la vie. Dans un élan de générosité magnanime, la vie continue à générer de la vie dans chaque être vivant, comme un reflet de la force vitale qui nous habite. Chaque fois que naît un enfant, un animal, une plante, c’est un miracle de la nature qui nous fait prendre conscience que tous les êtres vivants sont rattachés par ce lien invisible qui nous lie à la Création.
Le don de la maternité doit conduire chaque femme à s’interroger sur ce pouvoir qu’on lui donne d'être mère. De la même façon que les gouvernements ont «des organismes régulateurs» dont le rôle est de contrôler les abus de pouvoir qui peuvent avoir lieu en leur sein même, chez chaque femme il y a une petite voix que nous appelons «conscience» qui lui dit quand utiliser l’argument de la maternité comme outil de pouvoir pour manipuler les enfants ou le mari afin d’obtenir ce qu’elle veut pour elle-même. Le fameux «chantage affectif maternel» devrait être immédiatement freiné par les mères elles-mêmes une fois détecté, ou éventuellement par leur partenaire, ou par leurs enfants, car tout individu est libre et ne devrait pas avoir à se soumettre à d'autres au seul prétexte de la parenté, dans ce cas mal interprétée. Avoir le courage de se fixer des limites est un art à apprendre pour la vie.
En ces temps où le rôle de la femme change vertigineusement, chacune d’entre nous doit se demander comment elle souhaite sa propre vie, au lieu, comme c’est généralement le cas, et inconsciemment, de suivre le modèle de ses ancêtres ou de son environnement social. L'héritage que nous ont laissé nos ancêtres sur la maternité est devenu, la plupart du temps, le rôle que l'on attend de chaque femme. La maternité n'était pas un choix, mais une forme de vie. En plus de l’expérience merveilleuse de donner naissance et d’élever des enfants, la maternité pouvait également devenir une forme d'acceptation de soi, de réalisation de soi, une carte de visite, « une mission pour la vie », qui se heurte à la réalité du « syndrome du nid vide» lorsque les enfants décident de prendre leur envol. De nombreuses mères se voient alors obligées de prendre une retraite anticipée, généralement non voulue, dans leurs tâches quotidiennes...
Pour beaucoup de femmes qui pourraient se sentir forcées de se marier, de fonder une famille ou de rester «vieille fille», la maternité peut devenir une façon de se libérer de leur partenaire ou de leurs familles, ou même une «arme» au moment d’attraper son mari dans ses filets. Quand la femme n'était pas indépendante financièrement et ne pouvait donc pas réaliser ses rêves, elle était souvent contrainte de se projeter sur ses enfants, vivant leurs réussites et souffrant de leurs échecs. Il est toujours beaucoup plus «commode» de se refléter dans les autres plutôt que d’avoir le courage de prendre les rênes de son existence et la responsabilité de sa propre vie. Le manque d’opportunités ou le manque d'initiatives pour profiter de celles qui arrivent, sont nos limites habituelles pour apprendre à l'école de la vie sans rendre les autres responsables de la façon dont nous vivons.
Fonder l'estime de soi sur les succès ou les échecs de ses enfants a un coût émotionnel très élevé tant pour la mère que pour l'enfant qui souffrira toute sa vie de «ne pas être suffisant pour sa mère» alors que ce devrait être elle la seule responsable de son propre bonheur. La maternité mal comprise peut être un terrain fertile pour les problèmes de communication, la fragilité, la solitude et le manque d'estime de soi pour les mères et les enfants qui peut avoir pour conséquence que les enfants à leur tour aient des relations de dépendance basées sur l'insécurité.
Cependant, chaque personne a la possibilité de sortir de cette spirale de relations malsaines. L’être humain a la capacité d’orienter sa vie de manière positive ou négative, en choisissant librement de s’engager dans l'une ou l’autre de ces deux voies. Au moment d'être mère, chaque femme reçoit des dons supplémentaires de la vie qui vont lui permettre de donner tout son amour et sa capacité de protection à ses enfants. Toutefois, si la mère n'a pas reçu de sa propre mère tout ce dont elle avait besoin, elle risque de transmettre à son bébé ses propres carences affectives.
Cela implique beaucoup d’humilité et de sincérité de s’interroger, d’apprendre à se connaître pour vivre positivement la maternité sans rien attendre de nos enfants. Donner naissance est un acte d'amour et cette lumière intérieure qui est en nous doit se refléter à l’extérieur, nous rendre plus généreuse pour devenir le phare de nos propres vies et de celle de nos enfants, que nous engendrons, mais qui ne nous appartiennent pas puisque ce sont des créatures de la vie...