L'arrivée d'un bébé bouleverse la vie de couple à tous les niveaux, y compris dans l'intimité. Plus de 85% des femmes connaissent des difficultés sexuelles après l'accouchement, un phénomène naturel mais souvent tabou. Comprendre ces changements et savoir comment les accompagner permet de traverser sereinement cette période de transition et de retrouver progressivement une intimité épanouie.
La naissance d'un enfant entraîne certains changements dans la relation du couple. La douleur périnéale et la dyspareunie (douleur pendant les rapports sexuels) sont fréquentes en post-partum et peuvent entraîner une baisse du désir sexuel. Ces symptômes sont très fréquents après un accouchement par voie basse, et certaines femmes en viennent à préférer la césarienne pour cette raison.
L'accouchement peut entraîner des traumatismes physiques à la suite d'une inflammation des organes génitaux internes. Cette douleur s'accentue lors de la pénétration du pénis. Les organes génitaux externes sont également sensibles et irrités. Tout cela est à l'origine de troubles sexuels. Selon l'Organisation Mondiale de la Santé, 35% des femmes souffrent de dyspareunie dans la période post-partum, faisant de ce trouble l'une des complications les plus fréquentes après la naissance. Il faut un peu de temps pour que tout revienne à la normale et qu'aucune douleur ne survienne pendant les rapports.
Les troubles sexuels physiques les plus fréquents
Les manifestations physiques des troubles sexuels post-partum sont variées et touchent la majorité des nouvelles mamans. Ces symptômes résultent des transformations subies par le corps pendant la grossesse et l'accouchement.
- La sécheresse vaginale ou la diminution de la lubrification sont une conséquence des changements hormonaux qui surviennent pendant l'allaitement. La chute des œstrogènes pendant cette période peut prolonger ce symptôme pendant plusieurs mois.
- Les blessures causées lors de l'accouchement peuvent provoquer une douleur lors de la pénétration. Ces traumatismes touchent particulièrement le périnée et le vagin, créant une sensibilité qui peut perdurer plusieurs semaines.
- L'épisiotomie (ou incision du périnée) faite par le médecin pour faciliter le passage du bébé pendant l'accouchement peut être à l'origine de douleurs. Avant de recommencer à avoir des rapports, il est nécessaire que cette blessure soit complètement cicatrisée.
- La faiblesse des muscles vaginaux peut poser des problèmes pour atteindre l'orgasme. Les contractions produites au cours de l'orgasme peuvent également provoquer des douleurs à cause des contractions utérines. Cette faiblesse musculaire affecte également la sensibilité et peut créer une sensation de "vagin trop large".
- Le saignement après un rapport sexuel peut apparaitre, en raison de la fragilité de la muqueuse vaginale.
Les troubles sexuels psychologiques et émotionnels
L'aspect psychologique joue un rôle majeur dans les troubles sexuels post-partum. Les bouleversements émotionnels et pratiques liés à l'arrivée du bébé créent un contexte peu propice à l'épanouissement sexuel.
- La fatigue causée par l'arrivée du bébé peut diminuer l'intimité du couple. Les réveils nocturnes répétés et l'épuisement physique réduisent naturellement la libido et l'envie d'intimité.
- Certaines femmes peuvent souffrir de dépression post-partum (baby blues) en raison de la nouvelle responsabilité et des changements hormonaux. Ces sentiments de tristesse, de colère, d'inadaptation et de malaise général ne créent pas un cadre propice aux relations sexuelles.
- Après l'accouchement, 70% des femmes interrogées à quatre mois post-partum avouent ne pas aimer leur nouveau corps. Les transformations physiques (gonflement de l'abdomen, vergetures, modifications de la poitrine) génèrent souvent une baisse de l'estime de soi et un manque de confiance en leur séduction.
- La peur de la douleur peut créer un cercle vicieux où l'appréhension génère des tensions musculaires qui accentuent l'inconfort lors des rapports suivants.
L'impact du mode d'accouchement sur la sexualité
Contrairement aux idées reçues, le mode d'accouchement influence différemment le retour à une sexualité normale. Des études récentes remettent en question certaines croyances populaires sur les avantages supposés de la césarienne.
Les recherches montrent que les femmes ayant accouché par césarienne ou avec assistance instrumentale (ventouse, forceps) ont deux fois plus de risques d'éprouver des douleurs lors des rapports sexuels 18 mois après l'accouchement comparativement à celles ayant accouché naturellement par voie vaginale.
Pour la reprise des relations sexuelles, les délais varient selon le mode d'accouchement : 60% des femmes sans épisiotomie recommencent à avoir des relations au bout de six semaines, contre 45% des femmes césarisées, et seulement 32% de celles ayant subi une épisiotomie ou l'utilisation de forceps.
Ces données soulignent l'importance de ne pas considérer la césarienne comme une solution préventive aux troubles sexuels post-partum, mais plutôt de se préparer à accompagner la récupération quelle que soit la modalité d'accouchement.
Les étapes de la récupération et conseils pratiques
La récupération sexuelle après l'accouchement suit généralement un processus progressif qui demande patience et communication au sein du couple. Il est essentiel de respecter son rythme et d'adopter certaines stratégies pour faciliter cette transition.
La période recommandée avant la reprise des rapports avec pénétration est de 4 à 6 semaines minimum, le temps que le col de l'utérus se referme et que les plaies cicatrisent. Cette attente permet de prévenir les risques d'infection et d'endométrite.
Pendant cette période de récupération, plusieurs approches peuvent aider :
• Privilégier l'intimité sans pénétration : caresses, baisers, massages permettent de maintenir la complicité du couple sans créer de douleur.
• Utiliser des lubrifiants : ils compensent la sécheresse vaginale liée aux changements hormonaux et rendent les rapports plus confortables.
• Adapter les positions : certaines positions peuvent être inconfortables selon le type d'accouchement. Après une césarienne par exemple, éviter les positions où le poids du partenaire s'exerce sur l'abdomen.
• Pour les mamans qui allaitent : tirer le lait ou nourrir bébé au préalable permet d'éviter les éjections de lait pendant l'intimité, source possible de gêne.
La récupération physique complète après l'accouchement nécessite souvent plusieurs mois, et il est important de ne pas se mettre de pression inutile.
L'importance de la rééducation périnéale
La rééducation périnéale constitue un élément clé pour retrouver une sexualité épanouie après l'accouchement. Cette démarche, souvent prescrite par le médecin ou la sage-femme, va bien au-delà de la prévention de l'incontinence urinaire.
Le périnée, ensemble de muscles qui soutiennent les organes pelviens, subit des étirements importants pendant la grossesse et l'accouchement. Un périnée affaibli peut réduire les sensations lors des rapports sexuels et diminuer l'intensité des orgasmes.
Les séances de rééducation, généralement proposées 6 à 8 semaines après l'accouchement, permettent de :
• Retrouver la tonicité musculaire nécessaire à de bonnes sensations sexuelles
• Prévenir ou corriger la béance vaginale (sensation de "vagin trop large")
• Réduire les risques d'incontinence urinaire lors de l'effort
• Améliorer la proprioception et la conscience corporelle de cette zone
Ces séances représentent également un moment privilégié pour échanger avec un professionnel de santé sur les craintes et difficultés rencontrées. N'hésitez pas à aborder vos préoccupations concernant la sexualité avec votre sage-femme ou kinésithérapeute spécialisé.
Les exercices de renforcement du périnée peuvent également être pratiqués à domicile en complément des séances professionnelles.
Vos questions fréquentes concernant les troubles sexuels après accouchement
1. Combien de temps durent généralement les troubles sexuels après l'accouchement ?
La durée varie considérablement d'une femme à l'autre. Près de 90% des femmes ressentent des douleurs lors du premier rapport post-partum, mais ce pourcentage diminue à 25% chez celles qui reprennent les activités sexuelles 18 mois après l'accouchement. La plupart des troubles physiques s'améliorent progressivement dans les 3 à 6 premiers mois.
2. La césarienne protège-t-elle des troubles sexuels post-partum ?
Non, contrairement aux idées reçues, les études montrent que les femmes ayant accouché par césarienne ou avec assistance instrumentale ont même plus de risques de douleurs persistantes que celles ayant accouché naturellement par voie vaginale. La césarienne n'est donc pas une protection contre les troubles sexuels.
3. Quand faut-il consulter un professionnel ?
Il est conseillé de consulter si les douleurs persistent au-delà de 3 mois, si la sécheresse vaginale ne s'améliore pas, si vous ressentez une perte totale de désir ou si ces troubles affectent significativement votre bien-être et votre relation de couple. Un gynécologue, une sage-femme ou un sexologue peuvent vous accompagner.
4. L'allaitement aggrave-t-il les troubles sexuels ?
L'allaitement peut prolonger certains symptômes comme la sécheresse vaginale en raison de la diminution des œstrogènes qu'il entraîne. Cependant, cet effet est temporaire et s'estompe généralement après le sevrage. L'utilisation de lubrifiants peut grandement aider pendant cette période.
5. Est-il normal de ne plus avoir envie de rapports sexuels après l'accouchement ?
Absolument, la baisse ou la perte temporaire de libido fait partie des changements normaux du post-partum. Entre la fatigue, les bouleversements hormonaux et l'adaptation à votre nouveau rôle de mère, il est naturel que la sexualité ne soit plus une priorité immédiate. Cette phase est généralement transitoire.
Gérer les changements corporels et psychologiques fait partie intégrante de l'adaptation à la maternité et influent directement sur la sexualité.
Conclusion
Les troubles sexuels après l'accouchement constituent une réalité vécue par la grande majorité des femmes, touchant aussi bien les aspects physiques que psychologiques de l'intimité. Comprendre que ces difficultés sont normales et temporaires permet de les aborder avec sérénité plutôt que de les subir dans le silence.
La communication ouverte au sein du couple, l'accompagnement médical approprié et le respect de son propre rythme de récupération sont les clés d'un retour progressif à une sexualité épanouie. N'oubliez pas que votre bien-être et votre confort doivent toujours primer sur toute pression externe ou interne.
